Joseph Edgar, de son vrai nom Marc Poirier, est un enfant de Moncton dont la voie vers la musique n’était pas déjà toute tracée. L’Acadien se dirigeait plutôt vers une carrière en arts visuels ou en écriture, jusqu’à ce que des rencontres et des circonstances opportunes en décident autrement.
Inspiré par des poètes acadiens comme Gérald Leblanc, il a fait ses premiers pas artistiques en poésie. De là est né son premier groupe, Symétrie, suivi de Zéro Degré Celsius, un groupe acadien culte qui aura aussi connu du succès sur la scène canadienne et européenne. En 2004, après près de 10 années de succès au sein du groupe, Joseph Edgar décide de tenter sa chance en solo et lance son premier album, La lune comprendra. Cinq albums et un mini-album (EP) plus tard, l’auteur-compositeur-interprète de style folk rock est sur une lancée.
Chaque projet musical, je vois ça un peu comme une exposition; chaque album documente un état d’âme ou d’être où je me retrouve à ce moment-là dans la vie. – Joseph Edgar
L’année 2014 marquera un tournant dans sa carrière solo. Le lancement de l’album GAZEBO et sa pièce « Espionne russe » ont littéralement propulsé Joseph Edgar sur la scène musicale francophone. Sa demande de subvention lui ayant été refusée, il a pris les choses en mains et s’est filmé avec son téléphone en dessinant lui-même en direct les visuels de la chanson. Cette vidéo, témoin de l’importance des arts visuels dans sa vie, a d’ailleurs connu un succès fulgurant sur YouTube en étant visionnée plus d’un million de fois. L’artiste a repris la formule pour sa pièce « Alors voilà », en dessinant les quelque 300 visuels nécessaires à l’animation.
Installé à Montréal, Joseph Edgar travaille maintenant sur son 6e album, qui devrait voir le jour au début de 2016
Joseph Edgar à Moncton
Une weird de place
De ses premières batailles avec les anglophones à ses tout premiers spectacles hors de l’école, Joseph Edgar se remémore ses souvenirs d’enfance dans les rues de Moncton. Il nous amène aussi au centre culturel Aberdeen, où toutes ses aventures artistiques ont commencé.
Le Bruce Springsteen de l’Acadie
Jean-Étienne Sheehy
Les chansons de Joseph Edgar s’écoutent comme le documentaire d’un éternel routier, qui s’arrête quelques instants sur le bord d’un chemin de campagne, le temps d’immortaliser l’instant présent. La démarche de l’auteur-compositeur-interprète originaire de Moncton s’inscrit dans la tradition folk, même si ses chansons évoquent un lieu précis, tant dans l’espace que dans le temps.
Il ne suffit qu’à tendre l’oreille à la dextérité poétique de Joseph Edgar pour y déceler un portrait détaillé de ces clichés pris en cours de route au long de son imposante discographie. En solo, il y a les introspections à nu de La lune comprendra, les journées ensoleillées en plein milieu du centre-ville de Moncton sur Oh ma ma et les instants de communion avec la nature sur la côte de la Baie Sainte-Marie pendant Y’a un train qui s’en vient. Puis en 2012, Interstices marque un tournant. Joseph Edgar se tourne vers le monde en quittant sa zone de confort, pour traiter du quotidien avec cynisme. Une nouvelle forme d’urgence s’installe chez lui, se faisant sentir par l’appel d’un certain GAZEBO, en 2014.
Joseph Edgar n’a pas dénaturé sa démarche en s’installant à Montréal. Au contraire, la métropole lui a permis d’affirmer pleinement sa curiosité envers le chaos de la ville, tout en réconciliant son identité acadienne à l’universalité d’une histoire bien racontée. Il s’agit d’un bel exploit. L’Acadie est à Joseph Edgar ce que le New Jersey est à Bruce Springsteen. GAZEBO permet à Joseph Edgar de prendre vie à l’extérieur des rues de Moncton. « Espionne russe », c’est le froid et le gris de la ville, perdu entre les immeubles de briques de « Mont-Royal, tout près de Saint-Denis, » comme il le chante. Désormais, son œuvre touche le commun des mortels.
Cette accessibilité n’est pas anodine, car elle se traduit par un nouvel engouement populaire envers l’auteur-compositeur-interprète. Les chansons de GAZEBO trouvent preneur, car elles offrent une synthèse des bons coups de Joseph Edgar. Son approche du folk rock bénéficie de la précision qu’il apporte au texte et de l’impulsivité qu’il insuffle aux musiques, tel le fils spirituel de Neil Young et du défunt poète acadien Gérald Leblanc. Le résultat demeure personnel, signé à la main par Joseph Edgar. À ce sujet, n’oublions pas que le vidéoclip « Espionne russe », visionné plus d’un million de fois, fut dessiné à la main par Joseph Edgar.
Derrière ce pseudonyme, il y a Marc Poirier, figure de proue parmi les artisans de la scène culturelle acadienne et artiste multidisciplinaire qui se réinvente de projet en projet. Son fidèle chapeau arboré depuis ses débuts en solo sert de rappel à l’importance du personnage dans la création d’une identité musicale acadienne urbaine. Durant les années 1990, Poirier était à la tête de Zéro Degré Celsius, groupe qui a réconcilié le bouillonnement du rock alternatif américain avec l’audace et l’unicité de l’Acadie. Le premier disque du groupe, Contes du Coude/Tales From The Bend, sert d’élément déclencheur en mélangeant les genres et les langues à l’intérieur d’un environnement rock.
Les chansons griffées par la voix de Marc Joseph Edgar Poirier se rapportent à un moment fixe. Toutefois, son œuvre passera à la pérennité, car celle-ci ne prend aucune ride. Surtout, en réécoutant la discographie de Joseph Edgar, les textes reprennent les couleurs et les plis de l’époque. Cette présence en solo s’étale sur une dizaine d’années, assez pour s’apercevoir que les diverses formes de Joseph Edgar servent de bande sonore à nos vies. Les portes ouvertes par GAZEBO lui donnent accès à un nouvel univers créatif. En attendant, une œuvre imposante n’attend qu’à être découverte.
Photos en Coulisses
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Suivez Joseph Edgar et son chapeau dans la Ville reine, grâce à un montage des meilleurs moments de sa visite croqués sur le vif.
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