Simon Jutras, alias Mclean. Mclean, alias Simon Jutras. Né à Sudbury, en Ontario, l’auteur-compositeur-interprète a roulé sa bosse comme guitariste au sein de quelques groupes avant de tenter l’aventure solo en 2013. C’est cette même année qu’il donne officiellement le coup d’envoi à son projet Mclean lors du concours Ontario Pop, où il remporte d’ailleurs le prix Petite Vallée en écriture.
Dans son processus de création, le guitariste classique de formation se plaît à jongler avec les volets littéraire et musical.
J’ai fait des études en création littéraire centrées surtout sur les nouvelles et la poésie par nécessité, car le format des classes limitait la longueur des textes. J’ai réalisé que j’étais un peu un imposteur — un musicien dans un cours de création littéraire. Mais ça m’a permis de trouver une base philosophique et une structure de création que j’ai pu appliquer à la musique. Très important pour aller chercher des concepts, aller chercher des idées philosophiques.
Après le lancement d’un premier extrait en mars 2015, Mclean a suivi avec l’album Sans l’abri d’un quand l’été suivant. Ce premier album écrit en isolement dans un chalet près de sa ville natale est en partie inspiré de lectures trouvées ici et là pendant sa retraite, que ce soit des index de villes canadiennes ou des livres de botanique et de science. Il compte des titres aussi originaux qu’inusités, comme « Amorphophallus Titanum », le nom d’une fleur qui a été le point de départ d’une chanson sur le cycle de vie d’une fleur et d’un humain.
Le Franco-Ontarien derrière Mclean est notamment monté sur la scène des FrancoFolies en 2015. Il lance en 2016 un nouvel extrait tiré de son deuxième album, qui devrait voir le jour en 2017.
MCLEAN À SUDBURY
Inspirante solitude
Mclean nous invite chez lui, à Sudbury, berceau de ses premiers coups de plume et premières compositions musicales. Passage obligé à chaque visite dans son patelin, on s’arrête à la fromagerie Elgin, où le Franco-Ontarien aime donner des spectacles dans un cadre intimiste, et on visite le chalet familial de son enfance, devenu une source d’inspiration intarissable.
faire sauter le Bouclier canadien
Jean-Étienne Sheehy
Ils sont rares ces ovnis qui arrivent à affirmer le caractère unique de la francophonie hors Québec tout en repoussant ses frontières musicales et géographiques, à l’extérieur du folk et de la pop. À ce niveau, Mclean offre un véritable électrochoc qui frappe aux endroits justes afin de brasser la cage, sans dénaturer ses origines franco-ontariennes.
On plonge dans les vapes quand les premiers sons émergent de « Circadienne ». Cette brève introduction ne donne pas le ton à la démarche de l’auteur-compositeur, car il finit plutôt par s’inspirer du New Wave post-nucléaire des années 1980, avant de groover, dans la tradition rock planante des années 1970.
Trêve de référents temporels : les chansons de Mclean existent à l’extérieur de l’espace-temps, comme si Cano rencontrait Pink Floyd, époque Meddle, en plein cœur du centre-ville de Montréal. Ses chansons s’écoutent plutôt comme un collage sonore où les influences se succèdent à la vitesse où il enchaîne les mots; « La terre tournait et toi aussi, comme une toupie ». L’image se démarque, car cette excentricité étourdit les plus téméraires, tout en demeurant séduisante pour ceux qui carburent à l’audace.
Quand Mclean crie « Amorphophallus Titanum », il détonne comme une explosion qui se fait entendre à partir des mines de nickel de Sudbury. La déflagration est d’autant plus forte. À travers la poussière de dynamite, le Sudburois laisse entrevoir des instants d’une grande sensibilité, où l’authenticité a le dessus sur la futilité.
Tant mieux, car Mclean remonte sur terre, pour se perdre dans un « Camp de chasse », quelque part dans la solitude de la forêt boréale, « dans un lit simple, sans couverte ». Ici, l’urgence du rock cède la place à des arrangements plus orchestraux, superposés à un instinct folk.
Plutôt que de rebondir dans le chaos initial, Mclean murmure les mots de « Vierge » en y affirmant ses contradictions; le « vin blanc » est servi dans un « verre de scotch ». Il faut tendre l’oreille pour saisir la spirale lyrique dans laquelle il s’enfonce, tant les mots finissent par dépeindre un portrait au-delà de l’excentricité. Il n’y a aucun compromis ici, le Franco-Ontarien préfère l’authenticité.
Il en va de même quand le fingerpicking de « Délicate » dévoile un refrain et son immense désaccord poétique : « Je t’offre le rien, c’est ce qu’il me reste ». Une lourde basse saturée soutient la suite, avant de céder à la cohue finale, qui sert peut-être du rien mentionné plus tôt.
Puis, Mclean creuse cette vanne avec les synthétiseurs ténébreux de « Guerrière ». À mi-parcours, la boîte à rythmes hypnotiques se fond à une vraie batterie, afin de permettre au choc entre les différentes facettes de l’artiste de prendre forme avec beaucoup de naturel.
Unique titre instrumental immortalisé sur un enregistrement de Mclean, « Church & Horse » possède des qualités de musique de film. Ces escapades musicales aboutissent à « Tigh Deh », un joyeux délire d’inspiration celtique en guise de point d’orgue à l’œuvre de Mclean. Malgré son caractère nébuleux, ce titre allie les mélodies de l’instrumentation quasi traditionnelle à l’audace de ses arrangements. Après s’être laissé bercer par son caractère vaporeux, Mclean clôt de manière grandiose et ambitieuse dans une conclusion porteuse et immense, qui témoigne de son talent de compositeur. On assiste à l’aboutissement de ses recherches poétiques et musicales, qui éclosent au grand jour.
Cette victoire sera de courte durée. « Je vis d’une inquiétude à l’autre », affirme-t-il seul au piano, sur la pièce-titre de son premier disque, Sans l’abri d’un quand. Décidément, pour Mclean, l’éclatement poétique fonctionne mieux lorsqu’il est accompagné d’une certaine subtilité musicale. Cela favorise le caractère sombre de sa démarche, particulièrement lorsque le violon s’agence à la fragilité de sa voix, lorsqu’il le souligne au crayon gras : « Maintenant sans l’abri d’un quand ».
Mclean préfère s’affirmer pleinement, et s’il n’est pas à l’abri d’un quand ou de quelques excès, il peut se vanter d’être à son meilleur lorsqu’il troque le confort pour la démesure.
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Entrevue
Mclean nous raconte comment il parvient à intégrer à sa musique certaines notions apprises dans ses cours de création littéraire et il nous confie l’histoire derrière sa pièce « Church & Horse » inspirée d’une peinture.
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